Deux semaines s’étaient écoulées avant que Dorcas ne trouve suffisamment de force pour rendre visite à son très cher ami, Andrei. Elle le connaissait depuis de nombreuses années, maintenant, avait partagé des moments très forts avec lui et le considérait à présent comme l’un de ses plus proches amis. Peut-être, certainement, le seul d’ailleurs. Il lui semblait donc tout à fait normal de faire cet effort qui n’en était pas un au regard de l’affection qu’elle lui portait. Elle ne se forçât pas à s’apprêter correctement, malgré les douleurs qui s’élancèrent dans son dos quand il lui fallut accrocher les boutons situé dans la même région, ni même à affronter les regards interrogateurs de ce visage autrefois si beau, aujourd’hui cerné de traits tirés. Elle était prête à beaucoup pour lui et par une ironie du sort certaine, ce ne fut qu’après plusieurs reprises vaines que Dorcas eut connaissance que le prince ne se trouvait pas dans ses quartiers mais à l’hôpital de la capitale. Elle se maudissait de ne pas avoir réfléchi davantage, elle aurait ainsi évité de croiser la route désagréable de Weiss. Mais ainsi était faite la vie et, quelque part, Dorcas se contenta en trouvant dans son incapacité à approcher la porte de la chambre royale dans laquelle Andrei était supposé se trouver, la preuve d’un lien insécable entre eux. Peut-être n’avait-elle pas eu la force nécessaire de réduire la distance entre elle et cette chambre qu’elle avait autrefois tant aimée, justement parce qu’elle sentait que quelque chose y manquait, à savoir Andrei.
Quand elle fut remise de ses émotions, elle retrouva une certaine détermination à retrouver son ami et pour de bon cette fois-ci. Une force nouvelle la porta jusqu’à l’hôpital, la poussa à insister pour qu’on la laisse passer puis pour avoir un moment en tête à tête avec le malade. Elle connaissait les gardes, ce n’était pas si difficile, mais jamais on ne lui aurait demandé de prouver son identité auparavant, à savoir avant que tous les incidents se produisent et qu’Andrei ne tombât dans le coma. Mais toutes les larmes qu’elle contenait jusqu’alors ruisselèrent sur les joues une fois que la porte se rabattit derrière elle. Elle sentit l’atmosphère se rafraîchir et s’empressa de courir au chevet de son ami, pour glisser sa main dans la sienne. Elle n’était pas chaude, pourtant Dorcas se sentit rassurée. Elle qui ne se fiait jamais à ce qu’on lui rapportait s’était imaginée un Andrei glacial, immobile, mort. Or il y avait du mouvement sous ses paupières et il avait gardé ce teint rosé qui le caractérisait si bien. Il n’était pas parti, il ne l’avait pas abandonnée, il était là. Il était juste là et attendait le moment propice pour se réveiller. Pourtant Dorcas n’aurait su dire si les larmes qui coulèrent derechef étaient l’expression d’un immense soulagement ou d’une douleur incommensurable. Elle préféra ne pas s’y pencher, elle n’aurait pu le faire même si elle l’avait souhaité : pour lors, elle ne pouvait qu’exprimer par les larmes toute la peine qui s’était abattue sur elle depuis ces derniers mois. Ses plus grandes peurs s’étaient réalisées, à savoir être blessée physiquement et ressentir à nouveau de l’abandon.
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