Le monde s'était effondré. Il s'était effondré en une fraction de seconde, un tintement sourd dans le silence. Les myocardes s'étaient serrés, ils s'étaient atrophiés, faisant pulser l'hémoglobine dans les tempes de chacun en un quart de temps. Ils avaient tous succombé, comme si une maladie les avaient atteint. Comme si un virus s'était emparé de la coquille qui leur avait si longtemps servi de corps. Adonis avait disparu. Le roi si fraîchement couronné, n'était plus. Et Cedraella s'en voulait. Parce qu'elle avait failli à sa tâche. Parce qu'elle était plus que son professeur, parce qu'elle était plus que l'une de ses espionnes, ou la main armée d'Izolda. Elle était son amie. Et elle n'avait pas su le protéger, elle n'avait même pas su voir que quelque chose se passait sous son nez. Le myocarde se serre à nouveau, pétrifie le palpitant dans une danse saccadée qui tente de briser la cage dorée dans laquelle il est emprisonné. Elle se dirige dans les jardins du château, inspire un bref instant. La rage s'empare d'elle, colère transcendante qui s'empare de ses membres et de ses limbes. Elle jette son bras dans les airs, et le sol se scarifie d'une trace de lave brûlante et ardente. Elle l'observe un instant, avant de faire un nouveau mouvement. Un nouvel arc de cercle se forme, et vient croiser le premier. Elle tremble, s'arrête un instant et s'agenouille sur le sol. Elle le sauverait. Elle remuerait terre et ciel, paradis et enfer si cela lui était possible. Et elle devait protéger Izolda. Elle devait protéger cette amie, cette reine pour qui elle avait aussi juré fidélité. Et elle devait les protéger eux, ces chérubins qui n'auraient peut-être pas l'occasion de connaître un monde en paix. Elle se devait de les sauver tous, d'essayer. Elle inspire profondément, se relève. Elle passe une main dans ses cheveux, et se  raidit lorsqu'elle sent une main se poser sur son épaule. Elle attrape la dite main, et balance son corps en avant. L'individu tombe sur le sol, entraîné par la guerrière. Elle se redresse, secoue légèrement la tête, puis croise les bras sur sa poitrine. « Careful. Next time you may have no hand to hold on to. » dit-elle sur un ton déterminé. L'homme se redresse, se masse légèrement le front. Elle l'observe un instant. « I'm.. I'm sorry. I was calling you, several times, but you never answered. » Elle arque un instant un sourcil, avant de l'aider à se relever. « I'm the one who's sorry. » répond-elle plus bas. « Our Queen is asking for you, she needs you. » Elle détache son regard de ses prunelles un instant, repensant à l'entrevue qu'elle a eu avec cette dernière il y a peu. Elle était porteuse de mauvaise nouvelle, et Izolda l'avait béni en partageant la grande nouvelle avec elle. Elle lui avait promit Cedraella, promit qu'elle pourrait dire à son époux qu'elle était enceinte et qu'ils allaient être parents. Elle lui avait promit, qu'ils seraient réunis. Et elle tiendrait cette promesse, même si elle devait tuer elle-même Thomas pour ça. Même si elle devait perdre la vie pour eux. La maîtresse de la lave remercie le messager, puis entre à nouveau dans le château. Elle se rend jusqu'à sa chambre, où elle se change. Elle dépose le collier de perles sur le petit guéridon, retire sa robe émeraude et enfile une tenue plus adéquate. Plus guerrière. Elle se coiffe un instant, se maquille légèrement, puis pose ses yeux sur le petit monticule de terre posé sur sa table de chevet. Elle l'observe un instant puis lève sa main au dessus. La terre tremble légèrement, avant de se transformer en un disque de lave. Elle le fait léviter et bouger rapidement sous sa main, avant d'arrêter sa maîtrise. L'objet se durcit, et tombe dans un petit poc. Elle se relève, se tourne une dernière fois vers son reflet puis quitte la pièce. Elle ne pouvait faire attendre sa reine plus longtemps.

La démarche est féline, les jambes se croisent comme si elle défilait. La tête est haute, levée comme si elle possédait les lieux, alors qu'il n'en est rien. Elle n'est qu'une invitée ici, une sujet parmi tant d'autres. La guerrière s'arrête un instant devant la grande porte en bois. Elle n'hésite pas longtemps avant de toquer. La porte s'ouvre sur une dame de compagnie, et elle s'annonce. Présentations dénuées d'émotions, arrogance cependant lorsqu'elle prononce le nom si particulier des K'han. On la laisse entrer, et elle s'avance dans la pièce. Elle ne fait pas attention aux dames de compagnies, qu'elle juge presque inexistante et se dirige automatiquement vers Izolda. Elle attrape ses doigts, et lui baise la main, avant de relever ses prunelles. Elle les place dans ses iris, et un léger sourire rassurant se peint sur ses lèvres. « How are you feeling ? » Question stupide, mais le ton doux de l'amazone se veut lui aussi rassurant. Il est emprunt d'affection. Elle dépose ensuite ses iris sur le bas ventre de la déesse en face d'elle, avant de lui sourire à nouveau. « I warned the council, as you asked me to. I may have to leave Foushin soon, for the others. » dit-elle pour lui donner une mise à jour sur leurs plans. « One of your guards told me that you needed me, what's happening? » dit-elle sur un ton cette fois ci concerné. Elle passe légèrement sa langue sur sa lèvre inférieure alors que ses ambres se posent sur celles de la reine. Ses paupières papillonnent légèrement, avant que son visage ne se ferme à nouveau.

Assise face à sa coiffeuse, un verre de vin à la main, Izolda laisse ses dames de compagnie prendre soin de sa chevelure emblématique. Elle les laisse maquiller son minois fatigué. Elle porte les stigmates de nuits passées à réfléchir plutôt qu’à dormir. Les guérisseurs avaient tout essayé, toutes les boissons possibles, toutes les plantes inimaginables pour qu’elle puisse enfin trouver le repos tant mérité. Mais rien n’avait fonctionné. Comment pourrait-elle se laisser aller à un monde de songes alors que son époux était emprisonné entre les murs de ce qui fut autrefois son foyer ? Izolda ferme ses paupières alors qu’elle l’imagine en train de se faire torturer. Si Thomas ne l’a pas encore tué, alors il a certainement commandé que l’on fasse de son existence un enfer sur Terre. Un long soupir s’échappe de ses lèvres alors qu’elle rouvre ses yeux, laissant une servante y déposer un fin trait de khôl noir. Une touche de rose est déposée sur ses pommettes ainsi que sur ses lèvres douces. On y ajoute du miel pour les rendre brillantes. Des mains s’agitent dans sa chevelure d’ébène alors qu’une de ses dames de compagnie tire un peu trop fort dessus, lui arrachant une grimace. – I’m so sorry your Highness. La poupée ne dit rien, trop lasse, trop fatiguée pour répliquer. Sa main se pose sur son ventre, comme toujours, elle aime cette sensation et a l’impression d’ainsi pouvoir communiquer avec eux. Ses deux précieux. Ceux qu’elle se doit de protéger. C’est bien en cela qu’elle sait déjà qu’on lui refusera de participer à la bataille visant à libérer Adonis et à tuer Thomas. Elle aurait pourtant aimé lui planter elle-même une dague dans l’abdomen, à plusieurs reprises, et le voir s’écrouler sur le sol, mort. Mais ce privilège sera réservé à quelqu’un d’autre, peu importe qui, tant que cette personne aurait l’opportunité de pouvoir assassiné l’imposteur. Mais la douce n’avait pas que cette mission là en tête. Il y en avait une autre, une pour venger son amour Elhara. Les barbares avaient marché sur le fief des Sorensen et cela était inacceptable. C’est pour cela, en partie, qu’elle avait fait demander Cedraella. Mais aussi parce qu’elle avait besoin de son amie auprès d’elle, alors qu’elle a l’impression d’être plus seule que jamais. Pourtant, Izolda avait reçu le soutien de bien de nobles mais aussi de mêlés. Les partisans de son mari la considéraient bel et bien comme leur reine. Et en ce sens, ils l’épaulaient plus que ce qu’elle n’avait pu imaginer. Puis il y avait Cal aussi, qui lui avait promis de l’aider dans cette mission. Et étrangement Elizaveta aussi. La gamine s’était surprise elle-même à contacter la reine de l’air, laissant ainsi sa haine viscérale pour cette nation de côté. Adonis comptait plus que des querelles, il comptait plus qu’un passé qui est définitivement mort. Rien ne ramènerait plus Isaiah de toute évidence. Quand enfin sa préparation prit fin, la poupée se lève. Puis elle envoie des esclaves lui chercher du papier et de l’encre. Elle doit écrire à Elhara. Elle doit trouver des alliés dans la nation de l’eau. Thomas ne s’attend pas à voir les quatre nations unies, unies contre lui, unies contre son règne de tyrannie. Mais il restait son oncle et la gamine réfléchissait déjà à la missive qu’elle allait lui envoyer, afin de lui proposer la paix avant que la guerre ne commence, afin d’essayer que tout se résolve le plus pacifiquement possible. Elle ne voulait pas que du sang coule inutilement, que des innocents périssent pour un souverain qui n’en valait pas la peine et qui ne l’était d’ailleurs plus depuis longtemps. – Cedraella K'han is here, your Majesty. D’un geste de la main, elle donne l’autorisation pour la laisser pénétrer dans les appartements royaux. Debout face à la porte en train de s’ouvrir, elle affiche un sourire de convenance. Quand la silhouette de son amie se dessine sous ses yeux, elle se rapproche un peu plus de l’entrée. Rapidement, la brune attrape sa main et y dépose ses lèvres. Puis ce sont leurs regards qui se croisent et un sourire instinctif qui se glisse sur les lippes de la reine. – I try to survive. Elle peut sentir le regard de la guerrière se glisser sur son ventre, alors qu’elle y dépose sa main naturellement. Personne ne sait encore réellement qu’elle est enceinte, si ce n’était Braelyn et Cedraella. Peut-être le dirait-elle aussi à Elhara, peut-être. D’un revers de la main, elle envoie sa cour plus loin, ne laissant ainsi plus que les deux jeunes femmes. – Good. That’s good. I would prefer that you don’t have to leave me but.. I know you have to. Please, be safe. Elle en aurait presque oublié pourquoi elle l’avait fait venir. Mais la brune le lui rappelle alors que la poupée fait quelques pas dans ses appartements. – Yes, indeed. Elle croise ses bras contre sa poitrine avant de finir par se retourner, faisant face à Ced. – I know you already are, but i want to make it official. Elle se rapproche de nouveau de son amie, plantant ses iris dans les siens. – Cedraella K'han, would you do me the honor of becoming your queen's armed hand?

Elle essayait de survivre. Le palpitant se serre un peu dans sa poitrine, myocarde qui a mal, parce que la belle souffre. Et Cedraella, elle ne sait pas comment faire pour atténuer sa peine, elle ne sait pas comment faire pour que la déesse du métal, rose épineuse, renaisse de ses cendres. Si ce n'est en sauvant Adonis, si ce n'est en mettant à bien son plan. Elle sera sauve, pour elle. Elle survivra, pour elle. Parce qu'elle le doit à Adonis, et maintenant, à mesure que son myocarde se serre, elle sait qu'elle le doit aussi à sa nouvelle reine. Elle la regarde s'éloigner un peu, puis se retourner vers elle. « Izolda.. » La voix est pleine de gratitude, pleine de candeur aussi. Elle laisse ses iris s'enfoncer dans les siennes, sondant les ambres chocolatées d'une caresse invisible et intime. Elle s'agenouille, et attrape la main de la reine. Ses lippes viennent s'emparer de l'épiderme, caresse à nouveau éphémère qu'elle porte à la peau de la jeune femme. « It would be my honor, my queen. » Et ainsi, elle scelle le pacte. Ainsi, elle scelle à nouveau son destin, montant d'un échelon dans l'échelle sociale et gouvernementale de la nouvelle Eartanera. Elle se redresse, et ses lippes peignent un sourire. Elle vient replacer une mèche de cheveux derrière l'oreille d'Izolda, avant de baisser les yeux. Elle se recule, s'approche de la fenêtre de la chambre de la déesse, et observe le paysage. De là où elle est, elle peut voir les jardins, ainsi que la trace noire et béante laissée par son affrontement avec Adonis. Elle y trouvait une certaine beauté, quoiqu'une certaine terreur aussi. Les maîtres de la terre, étaient devenus des destructeurs de mondes. « I'm gonna stay one day more here. » Elle ne voulait pas la laisser, même si son devoir lui dictait qu'il fallait qu'elle parte. Elle ne pouvait pas la laisser, sans avoir réussi à faire naître une once de lumière dans le palpitant de la divine. Parce qu'elle le méritait, avec tout ce qu'elle traversait. Elle ne méritait pas d'être abandonnée, elle ne méritait pas d'être mise de côté. Elle méritait mieux, et plus encore. Elle méritait de récupérer Adonis, elle méritait d'obtenir vengeance, elle méritait toutes ces choses là. Et Cedraella lui permettrait de les ravoir, parce qu'elle lui en avait fait la promesse. Parce qu'elle était sienne. Le myocarde se serre un peu. « Do you remember the time, when all of us were happy? » Elle caresse l'embrasure de la fenêtre, d'un doigt léger. « When we didn't think about war, about the things we could lost. When we were just enjoying the moment? » Le seul moment heureux dont elle arrivait à ce souvenir Cedraella, avait été le jour le plus difficile de sa vie. Lorsqu'elle avait emmenée Draenys avec elle, au festival de Dragondale. Lorsqu'elle avait vu le sourire sur les lippes de sa sœur, parce qu'elle pouvait enfin passer une journée ensemble. Et lorsque le palpitant de la gamine s'était éteint, brûlé par les flammes du chaos et assiéger par les effondrements des bâtisses. Ses doigts serrent le bois de la fenêtre et ses ongles s'y plantent un instant, avant qu'elle ne se redresse et se tourne vers Izolda. « We'll find him, you'll find your happiness, once again. » Elle ne voulait pas qu'elle finisse par ressentir ce qu'elle ressentait, qu'elle soit submergée par cette détresse d'avoir perdu un être cher sans rien pouvoir faire. « I can promess you that. » Elle se rapproche d'elle, vient attraper sa main. Lui sourit, alors que ses yeux sont embuées de milliards d'étoiles. « But today, we need to clear your mind. » Elle baisse légèrement la tête sur le côté. « How can I help? »

Izolda ne veut pas mentir, pas à elle. La gamine ne vit pas, elle survit. Chaque jour qui passe l'éloigne un peu plus d'Adonis, déchirant ainsi son cœur. Elle ne sait pas vraiment ce qu'elle fait, dans le fond. Peut-être se trompe t-elle, sûrement même. Mais elle se contente de suivre son instinct, écoutant parfois les conseils avisés d'Isaak, unique survivant de leur conseil restreint, qui portait désormais bien son nom. La poupée ne dormait presque plus, s'alimentant à peine, juste ce qu'il fallait pour ses enfants à naître. S'ils n'étaient pas là, elle n'aurait pas donné cher de sa peau. Peut-être se serait-elle laissée mourir de chagrin. Il n'y a que l'idée de délivrer Adonis et d'achever Thomas qui lui réchauffe le cœur. Leur plan se met en marche et elle n'attend qu'une chose, partir pour Greenstall. Perdue dans ses pensées, elle repose ses iris noisettes sur le visage de la guerrière qui venait de prononcer son prénom. La K'han s'agenouille, attrapant sa main où elle dépose ses lèvres en un doux baiser. Un sourire écorche sa bouche alors qu'elle l'écoute attentivement. – The honor is mine. Elle attrape fermement sa main et l'aide à se relever, sans jamais quitter son regard du sien. Les deux jeunes femmes sont si proches que la poupée peut sentir le souffle chaud de Cedraella contre son visage. Ses iris basculent sur ses doigts alors qu'elle replace une de ses nombreuses mèches de cheveux derrière son oreille. Habituellement, la princesse aurait capturé les lèvres de son amie, depuis le temps qu'elle en mourrait d'envie. Mais pas aujourd'hui, elle n'était pas d'humeur à cela, pas depuis qu'il avait quitté le lit conjugal, arraché de ses bras. Hélas, la brune s'éloigne d'elle, allant trouver refuge près d'une des larges fenêtres. Izolda en profite pour renvoyer toutes les servantes, préférant rester seule avec sa nouvelle main armée. Un jour de plus. Voilà qui réchauffait le cœur de la poupée, mais cela ne faisait que repousser l'inévitable. Toutefois, Ced devait s'en aller, elle le devait pour de multiples raisons et elle ne pouvait pas la garder égoïstement pour elle. Récupérant son verre de vin, la gamine fit tourner le précieux breuvage entre ses doigts avant de porter la coupe à ses lèvres. Les nouveaux mots de l'amazone lui firent froncer son regard, elle ne comprenait pas réellement où elle désirait en venir. Heureux. Tous ensemble. Cela semble être si loin, elle se souvient à peine du parfum d'Isaiah et c'est bien cela qui la tourmente. Oublier. Oublier ceux qui sont partis.  Cela fait déjà trop longtemps qu'Adonis fut enlevé, mais elle n'a encore rien oublié de sa superbe, des expressions que prennent son visage, de ses lèvres sur les siennes, de ses bras autour d'elle. – The times are difficult for everyone. Even for royalty. But soon the war will be over and we will be able to find the peace we had. Même si rien ne sera comme avant, parce qu'ils devront vivre avec ce qu'ils ont vu, ce qu'ils ont subi et ainsi va la vie. Ils n'auront pas le choix que de reconstruire leur propre empire. Tout ira bien une fois qu'Adonis sera de retour, sa couronne enfin sur le sommet de son crâne. Un mince sourire se greffe sur ses lèvres alors qu'elle fixe de nouveau Cedraella, lui promettant des choses qu'elle ne pourrait tenir, mais c'était tout à son honneur de vouloir essayer. De nouveau, sa main trouva la sienne. Izolda peut voir les larmes envahir ses yeux et cela lui serre le cœur. – You are filled with good will, Ced. Elle se pince la lèvre. – It's great. Elle serre un peu plus fort ses doigts. – But I'm afraid it's probably useless. I can't stop thinking about it. All the time. I cannot sleep. I cannot eat. I cannot breathe.