Ma chère amie,

Je tenais à être la première à te félicité de ton nouveau poste. Je suis heureuse que sa Majesté le Roi Adonis, ait reconnu ta valeur et t’ait donc donné la place qui sied à ton rang et à tes talents. Mais au-delà de cela, la connaissance que rien ne te soit arrivée lors de l’affrontement contre les armées de l’ancien roi, les Sept aient son âme, me réchauffe le cœur. Je te sais capable, mon amie, bien plus que je ne le serais jamais avec un couteau entre les mains, mais te savoir en danger me remplie d’effroi. Je te supplie de ne plus mettre ta vie en danger ainsi, bien que je sache que si la situation s’y prête, ton honneur te dictera le contraire.

Mes prières t’accompagnent.

Ton amie, Alyssa Anovar.

Greenstall, le 3 mars de l'an de grâce 2165

Ma très chère amie,

Je te remercie de tout coeur de ces mots qui me sont si doux. Jamais je n'aurais envisagé, ou même espéré la position dans laquelle je suis actuellement. Je n'ai jamais désiré que de servir les Sept, et Sa Majesté, loué soit-il, m'a donné une occasion de remplir cette ambition. Je crains cependant qu'il ne me faille m'adapter à la vision de la religion qu'a la couronne - bien que nombre des aspects de cette vision ne me soient parfois dérangeants. Je n'ai jamais apprécié que la voix et l'ambition des hommes modèlent les paroles divines.
Je ne peux te promettre, ma chère amie, de ne plus m'engager dans l'armée, bien que je souhaite de tout coeur que la situation ne se reproduise jamais. Nous savons toutes deux que les temps sont agités. Je peux cependant te promettre de ne rien faire d'imprudent, pour le moment. Mes blessures, bien que bénignes, m'empêcheront très certainement de prendre les armes actuellement. Et je ne peux qu'avouer accepter la situation avec soulagement. Mais il me fallait veiller sur mes soeurs, et bien que j'aie visiblement failli à ma tâche, je ne peux qu'éprouver une certaine forme de paix en me disant que j'aurais, au moins, contribué à les défendre ne serait-ce qu'un peu.
Prends garde à toi également, ma fougueuse amie. Ne fais rien d'inconsidéré, je t'en supplie.
Avec toi, pour toujours,

Ma très chère amie,

Des rumeurs de la vision du Roi Adonis quant à la religion des Sept ont en effet atteints la capitale. Je ne pense pas que te dire que beaucoup désapprouvent soit nécessaire. Je crains mon amie, que la volonté de contrôle et de pouvoir sur toute chose soit l’apanage des puissants. Il aurait été bien étrange de plus pour sa Majesté Adonis, de laisser libre court à une chose mettant en doute ses qualités de roi, lui dont le règne a commencé si brusquement et violemment. Je t’enjoins à la plus grande prudence, ma très chère Keira : Quelque soient tes idées quand aux décisions de ton roi, ne te montre pas ouvertement contre lui. Il me semble qu’un homme tel que ton roi n’apprécie guère d’être mit en question, et je tremble à l’idée de ce qu’il pourrait advenir de toi.
L’annonce de tes blessures m’a remplie d’effrois, et je me réjouis d’apprendre ta réticence à reprendre les armes. Aussi capable que tu le sois, ma douce amie, je te crois l’âme trop pure pour la violence des Hommes.
Je comprends cet amour fraternel qui ta animé. Moi-même je serais prête à de grands sacrifices pour ma famille et mes frères. Comment vont tes sœurs ? Aucunes nouvelles ne me sont parvenues quant à elles, et je m’inquiète de leur état.
Tu sais que je ne prends jamais de décisions qu'après y avoir longtemps réfléchi, ma tendre amie. Mais je te promets d’être prudente. Sois sans crainte.
Puissent les Sept te guider dans la voie qui est maintenant tienne.

Avec toute mon amitié,
Alyssa Anovar

Greenstall, le 9 mars de l'an de grâce 2165

Ma très chère Lyly,

Je regrette tant que les rois se fassent parole des dieux. Il n'est pas homme, sur cette terre, qui puisse se déclarer voix des puissants. Et il n'est pas roi qui puisse s'octroyer ce privilège. Mais Sa Majesté porte la couronne, et c'est à ce trône que revient mon allégeance, sans que n'entrent mes divergences d'idées dans l'équation. Il me revient désormais de concilier au mieux les attentes du roi et la voix sacrée des Sept. Je te promets donc, ma très chère Lyssa, la plus grande prudence. Je t'assure que je saurais garder mes réticences pour moi, et je te jure sur les Sept qu'il ne m'arrivera rien de grave.
Je n'ai jamais approuvé la violence, tu le sais, et l'idée de tourner de nouveau mon arme vers un être humain me répugne. Je crois, mon amie, qu'une vie d'étude et de calme est ce qui me conviendrait le mieux. Il me fallait cependant veiller sur les miens - et j'ai failli à ma tâche. Hissa a été légèrement blessée lors des combats, mais elle se porte bien, ainsi que l'enfant qu'elle attend. Braelyn, cependant, a été gravement blessée, et je crains qu'elle ne puisse un jour remarcher. Je ne puis retenir mes pleurs en cet instant-même où je t'écris; pardonne donc les tâches d'encre que j'aurais de mes larmes diluée. J'ose cependant espérer, ma douce Alyssa, que ta famille se porte au mieux. Promets-moi de veiller farouchement sur eux, ainsi que tu l'as toujours fait, et de veiller sur toi aussi, également.
Ta présence et nos jours heureux à l'académie me manquent cruellement, mon amie. Puissent les Sept permettre à nous chemins de se recroiser bientôt.
Avec toi, pour toujours,

Ma douce Keira,
Ta promesse me soulage et me réchauffe le cœur plus que tu ne pourrais jamais l’imaginer. Je ne sais pas ce que je deviendrais si je venais à te perdre. Je n’ose même pas y songer une seconde de plus. Je n’aspire qu’à te voir heureuse et hors de tout danger, mon amie. Puisse cette promesse ne jamais être brisée.
Je ne connais que trop bien ton désamour du conflit, cher Keira, et te souhaite en effet de vivre la vie que tu souhaites dans la paix et la sérénité qui devrait toujours t’être due. Mais je ne connais que trop bien le sentiment qui a dû animer ton cœur. Moi-même je le sens m’entraver la gorge et me serrer leur cœur quand mes frères partent sur le champ de bataille. Mais je n’ai pas ton courage, mon amie. Je ne pourrais jamais les suivre. Il me faut donc les protéger autrement, à la manière qui est mienne et que tu réprouves tant.
Oh mon amie, sèches tes larmes. Tu n’as pas failli, douce Keira : Tes sœurs sont en vie. Le temps guérit les blessures, n’importe lesquelles, et j’ai foi que ce sera également le cas pour tes sœurs. Transmet mes félicitations à Hissa pour son enfant à venir et je lui souhaite de tout cœur que tout se passe pour le mieux lors de sa grossesse. Je prie également pour que ton roi, dans sa grande sagesse, sache ne pas attribuer les pêchés d’un père sur son enfant ou sa femme.
Tu me manques terriblement ma chère Keira, un peu plus chaque jour qui passe. Mais les Dieux semblent nous avoir entendu, mon amie, car dans quelques mois, je devrais me rendre à Launondie pour affaire. Il me sera possible de venir passer quelques jours à Greenstall ensuite, quelques semaines même. La découverte de cette nouvelle m’a remplie de joie, et il me tarde de revoir ton visage.
Il y a une chose dont nous n’avons pas parlé, mon amie, et je m’excuse profondément de cela. Tu sais sans doute que le virus nous a tous affecté, nous autres maîtres. Je ne fus pas une exception. Sortant de ma terrible fièvre, je me suis trouvée changée, douce Keira. L’eau ne m’a pas quittée, les Dieux en soient loués, mais une nouvelle capacité semble m’avoir été conférée. Je peux guérir, mon amie. Et je t’offre humble mon aide quand au sort de ta cousine. Ma maîtrise n’est pas parfaite, mais peut-être serais-je d’une quelconque aide. Pardonne-moi si cela te semble déplacé ou trop présomptueux de ma part, mais je ne puis supporter la vue de ces larmes que tu m’as envoyée.
Mes pensées t’accompagnent,

Alyssa Anovar