(missive secrète)

Mon cher ami,

Cela fait bien longtemps que nos routes se sont croisées à Aerinstin ou ailleurs, et tu as d'ailleurs du oublier les traits de mon visage au fil des années. Pourtant, mon admiration pour toi a toujours été sans limites, ma loyauté aussi. Plus qu'un suiveur, sache que tu trouveras en moi un véritable ami. Les bruits courent, la vie suit son fil, et les nouvelles de mon mariage il y a trois ans de cela à la fille d'Abraxas Belikov a du parvenir à tes oreilles. Ne t'y méprends pas, il n'y a là aucun soutien pour leur cause, ou celle de la royauté d'Aerinstin. Bien au contraire, c'est au fil des mois que j'ai découvert les véritables vices auxquels s'adonnent cette famille, et cela ne me surprendrait pas si la reine et les siens se perdaient aussi dans de telles perversions. Tu as d'ailleurs du entendre parler du mariage qui unira sa majesté au frère de ma femme dans quelques jours à peine. J'y serai présent, bien évidemment, alors fais ce que tu voudras de cette information. Mes ambitions dépassent celles d'un simple espion. En ayant ce genre de proximité au gouvernement, ce n'est pas t'informer que je souhaite, mais te conseiller. Il nous faut discuter entre hommes, car la parole n'est plus pour les femmes. Et si tu souhaites accepter cette rencontre, qui se devra d'être discrète pour ma sécurité, tu me comprendras, donne moi rendez-vous quelque part, quand tu le voudras. Et nous pourrons enfin discuter. Car il faut rattraper le temps perdu entre nous et restaurer cette belle amitié.

Avec toute ma loyauté,
Lyov B.

Cher Lyov,
J’espère que tout se déroule bien pour toi, malgré les années où nous avons dû être séparés. J’ai appris pour ton mariage avec Rayna et j’espère que cette union te convient. Je n’ai pas été cordialement invité puisque, comme tu le sais parfaitement, mes relations avec la famille Belikov sont pour le moins … Compliquées. Je suis cependant ravi de recevoir ta missive et cela, d’autant plus lorsque tu te plais ainsi à faire mes louanges. Cela n’est pas mérité mais je t’en remercie cependant, mon ami. Cela m’a énormément peiné de voir nos routes se séparer. Mais je suppose que c’est là le lot commun des hommes, n’est-ce pas ? Je suis cependant quelque peu étonné de te voir parler en ces termes si tranchés. Un conflit particulier t’oppose-t-il à la famille dont tu portes désormais le nom ? Sache que tu trouveras toujours en moi une oreille attentive et une épaule pour t’aider à supporter tes maux. Je suppose que tu dois en avoir énormément besoin en côtoyant une telle engeance. Je suis extrêmement peiné pour toi, Lyov. Tu viens seulement de mettre le doigt sur ce que je sais depuis bien longtemps. C’est pour cela que certains de mes amis et moi-même nous opposons au gouvernement de Liza ainsi qu’à ses partisans. Si tu souhaites te joindre à nous, tu es le bienvenu. Je sais que tu partages nombre de mes idéaux et que tu n’as jamais été un homme restant assis sans rien faire. La nécessité de l’action coule dans tes veines. Je devrais également être présent à ce mariage, même si l’envie n’est pas réellement au rendez-vous. Etant fiancé à la sœur d’Elizaveta, je n’ai d’autres choix que d’être présent. Surtout que ma stratégie pour l’abattre ne repose nullement sur un conflit armé. Mais plutôt sur une guerre de l’esprit. Et tu sais peut-être mieux que personne à quel point je peux me montrer retors et vicieux. Si nous nous croisons à ce fastidieux mariage, saluons-nous cordialement. Nous ignorer entièrement paraîtrait étrange. Je suis à ton entière disposition pour une rencontre. Je possède quelques modestes demeures à travers Aeristin, planques connus de très peu de monde. Je peux te donner l’adresse de l’une d’elles, si tu le désires et nous pourrons ainsi parler à loisir. Entre hommes.
Avec l’affection la plus sincère,
Achille Vasara