Il est là, allongé dans son lit. L’épaisse couette ne recouvre pas la totalité de son corps en cette froide nuit d’automne, mais il dort paisiblement. Assise sur un large fauteuil dans l’angle opposé à la porte qui mène à ta chambre, tu l’observes. Il fait nuit. Il fait noir. Mais la lune pénètre entre les rideaux fermés à la hâte. Tu penches la tête sur le côté pour la laisser reposer sur ta main. Tu te demandes à quoi il peut bien rêver. Est-ce de toi ? Ou de ses nombreuses conquêtes ? Tu souris en imaginant que son cœur bat peut-être pour toi uniquement parce que tu lui résistes. Après tout, il n’a jamais dit qu’il t’aimait n’est-ce pas ? Tes lèvres se souviennent d’un baiser, mais tu serais bien incapable de te remémorer le moment exact. Alors peut-être était-ce un rêve. Encore un. Ou bien un cauchemar. Ce qui serait déjà plus plausible te concernant.

Tu soupires en le regardant dormir. Qu’est-ce que tu fais là ? Tu devrais retrouver les bras de Morphée toi aussi. Pourtant tu t’es éclipsée de ta chambre immaculée pour rejoindre la sienne qui a connu tant de corps. Tant d’autres femmes. Si ce lit pouvait parler … L’image te dégoute alors tu détournes le regard. Mais une respiration plus forte de sa part te fait revenir à lui. Toujours lui. Tu serres les poings, la mâchoire. Pourquoi ? Les sourcils froncés, tu te relèves pour t’avancer jusqu’à ses pieds. Droite, fière, tu te demandes ce que ça impliquerait pour toi de lui faire du mal. Et si la lame de ta dague venait chatouiller sa peau ? Si tes éclairs venaient surprendre ses entrailles ? Est-ce que ça te ferait mal ? Tu tournes la tête vers l’ouverture à ta chambre. Vas-tu seulement oser récupérer l’arme pour t’amuser ? Il se tourne et tu recules d’un pas. Tu l’observes. L’admire presque. Mais son visage ne t’inspire que la haine et le dégoût. Pourtant ton cœur bat chaque fois que tu l’entends.

Tu hésites une seconde, puis deux et le temps semble filer à une vitesse folle alors que tu restes plantée là à te demander pourquoi ? Tu t’avances sur le lit. Lentement. Doucement. Et tu t’approches de son corps aux pays des rêves. Ta main vient effleurer son visage, la courbe de sa mâchoire, ses lèvres, son cou. Tu redescends jusqu’à glisser tes doigts entre les siens pour soulever son bras et enfouir ton corps contre le sien. Il dort, profondément. Et toi tu sombres entre ses bras. Le dos contre son torse chaud. Tu sens sa respiration, calme, dans ton cou et tes paupières se ferment.

Tu ne sais pas l’heure qu’il est ni depuis combien de temps tu dors contre lui. Mais un rayon de soleil vient te sortir de ta faiblesse. Plus jamais ça que tu te dis en t’extirpant hors du lit en tentant de faire le moins de bruit possible. Mais il est trop tard. Tu l’as réveillé. Le regard embrumé, il t’observe avec questionnement. Qu’as-tu encore fait ? Alors tu te redresses, attrape le premier vêtement que tu trouves et lui envoie à la figure. « Habille toi, on doit aller s’entrainer. » Tu n’es pas plus habillée que lui, mais il faut bien faire bonne figure. Sans attendre une réponse, un soupire ou même un regard, tu fuis jusqu’à ta chambre et en fermant la porte tu souffles. Pourquoi t’as fait ça Nahia ?