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Invité Invité
| Sujet: départ. (helace) Jeu 14 Déc 2017 - 23:56 | |
| assez vu. la vision s'est rencontrée à tous les airs. assez eu. rumeurs des villes, le soir, et au soleil, et toujours. assez connu. les arrêts de la vie. — ô rumeurs et visions !
helana & circe
Il continue de lui faire croire que son don n'est pas affecté. Il lui a fait l'amour en rentrant de la bataille, comme d'habitude, même intensités, mêmes lueurs, il la connait suffisamment pour s'être logé dans son esprit et lui faire croire en sa possession. Porte close en vérité, première expérience de l'amour lambda, délicatement fermé. Impossible d'ignorer les barrières osseuses et cartilagineuses de son crâne pour se faufiler de l'autre côté. Perturbé, il a plus d'une fois failli prendre la fuite devant son regard – mais elle aurait alors deviné. Il s'est forcé à venir malgré l'alerte paniquante : il n'est plus en elle. Plus totalement, comme le dieu omniscient qu'il a été si longtemps que ça lui semble presque toujours. Erreur. Retour à un monde pré-natal où tu n'étais pas télépathe, ou du moins ta télépathie n'était pas toi. Ce n'est pas qu'elle est fuyante, c'est qu'elle ne fonctionne plus. Je n'ai jamais été là, dit son absence. Il a réussi à lui faire l'amour juste avant de devenir fou. Avant que la fièvre ne vienne faire suer et trembler son corps entier, avant que d'un seul coup, la télépathie, partie cinq cent, revienne avec un prompt renfort : trois putain de mille en arrivant au port de sa tête, le dézinguant dans un éclair blanc. Il en a été aveugle pendant quatre jours. Elle aurait pu le voir, si elle n'avait pas elle-même été terrassée par son propre mal. La violence de Circe Thorsten semblait s'être retournée contre lui, le mortifiant chaque nuit, chaque jour de visions plus horrifiques les unes que les autres, faisant remonter à la surface du lac de sa mémoire des cadavres de souvenirs qu'il pensait avoir déglutis et digérés. Au milieu de sa fièvre est apparu le delirium : des rats. Des rats s'enfuyant à des vitesses d'oiseaux depuis le dessous du lit, des rats courant comme des lièvres contre le bois du plancher, des rats sous les draps et le long de ses jambes, des rats partout, des rats lui rappelant les débuts de sa propre existence. Replié sur lui-même, le ventre douloureux, les fesses au ras du sol, cherchant les derniers restes de nourriture coincés sous ses ongles, la tête polluée de poux et des pensées des autres venues le tourmenter en érinyes qu'il ne comprenait pas avoir mérité. Cloué au lit, il s'était, dans son délire, plus d'une fois éjecté et écroulé par terre, avait manqué de tuer un serviteur venu lui apporter un pichet d'eau, si bien que plus personne au sein de la citadelle Wheatdrop ne voulait plus entrer dans « la chambre de Thorsten ». Il rampait seul le long des couloirs pour se rendre jusqu'aux salles d'eau, se croyant lézard et passant plus d'une heure la langue contre le sol, à parlementer avec un cafard dont il était certain de pouvoir lire les pensées. Son regard, auparavant gris et profond, devenait par moment écarquillé puis à peine entrouvert, brillant d'une lueur folle qu'on ne lui avait jamais connue. La fièvre s'est calmée avec les jours, le laissant plus déshydraté qu'un parchemin, mais le dérèglement de tous les sens, lui, persiste. Sa télépathie est d'abord devenue schizophrénique : ses propres pensées résonnant à l'intérieur de lui comme des voix dissonantes murmurant en canon à l'entrée de ses oreilles ses propres paroles. On l'a vu traverser une pièce de la citadelle les mains plaquées de chaque côté de la tête, hurlant tout seul « JE SAIS » à des voix qui, de toute évidence, ne l'ont jamais entendu. L'écho a fini par s'éloigner (toujours grondant tel un orage dont on ignore le sens du départ), laissant place à une télépathie surréaliste : il peut ne rien entendre, ne rien pouvoir lire lorsqu'il se trouve à quelques centimètres à peine d'un humain, et se prendre en revers l'ensemble de ses émotions une fois ce dernier parti à des kilomètres. Les pensées d'un être lui parviennent soudain alors qu'il est seul dans une pièce, lui faisant presque croire aux fantômes, aux revenants, l'obligeant à chercher l'esprit qui se cache en ces lieux alors que c'est toute sa conception géo-spaciale qui ne répond plus aux lois de la science. Il voudrait une seconde de répit pour en être exaspéré, mais la maladie ne lui offre pas ce luxe. A présent que la notion de distance a explosé en lui, le délire s'est mué en une ultime couche saupoudrant la pièce-montée : le lien avec Helana a été rompu. Il l'a d'abord senti, à l'affut, jusqu'à en devenir certain, comme c'est le cas ce soir alors qu'il se tient debout dans ses appartements, le front à quelques centimètres de la fenêtre. Il est calme, de pouls et d'apparence, alors qu'à l'intérieur de lui, une tempête calibane fait rage. Il « lit » en Helana, oui, mais plus comme avant. Plus rien ne fait sens. Il lui semble l'avoir connue, au passé, dans une autre vie, mais pas un passé chronologique, historique. Un passé qui pourrait aussi bien être un avenir qu'un moment parallèle. Il ne saurait l'expliquer, mais tout a changé et le peu d'intuitions qu'il pouvait posséder au sujet de certaines choses a disparu. A présent, il peut le ressentir et l'admettre : jamais il ne s'est senti aussi vide. Lui faire l'amour sans être pleinement en elle, comme il l'a pourtant été jusqu'ici, c'est ne plus lui servir à rien. Il sait qu'il a fait vibrer la maitresse de la terre – et au fond, peut-être en était-il incroyablement satisfait. Sa propre impuissance lui apparaît soudain alors qu'il contemple le paysage de la nation de la terre. La vanité de ce décor l'amuse et le rassure, cette application avec laquelle les habitants d'ici ont tenté d'apprivoiser un élément auquel ils ont donné une âme. La terre est cultivée avec un soin rituel, choyée comme une enfant. Mais il sait à présent à quel point la terre ne rend rien de ce qu'on lui donne, que chaque truc qui pousse sort du sol parce qu'il ne peut en être autrement, et non parce qu'on l'a appelé. Il reste ainsi, debout contre la vitre jusqu'à ce qu'un voile noir recouvre Biogheriha et l'emplisse d'un silence maladif. L'intensité de la folie qui a pris ses quartiers en lui, depuis chaque terminaison nerveuse jusqu'aux racines de ses dents, se dévoile à moitié pour lui faire voir sa cuisse nue. Il sourit, à présent certain de ce qu'il a l'intention de faire. Jamais il n'a accordé le moindre crédit à la destinée. Ce soir est différent, parce que ce soir, rien ne ressemble à la réalisation de quoi que ce soit. Le temps s'est arrêté. Le chaos a déposé une main sacrilège par-dessus la bouche de l'histoire, et tout ce qui adviendra alors s'appellera liberté. |
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| Sujet: Re: départ. (helace) Sam 16 Déc 2017 - 20:36 | |
| La lueur des bougies avale faiblement les ténèbres environnantes. L’air ambiant est anormalement lourd : il trahit le combat se tenant au sein d’un faible corps alité. C’est une femme. Elle a le teint blême et les lèvres faiblement colorées. Sa peau semble avoir abondamment sué. Le corps est nu sous la couverture, qu’elle rejette parfois, fondante sous la chaleur, avant de la reprendre faiblement, glacée par le froid. Les lueurs des bougies semblent la gêner : elle maintient les yeux fermés, en quête d’obscurité. Ses sourcils sont froncés ; le sang fait vriller ses tempes, des couteaux lui massacrent le crâne. Endormie comme éveillée, elle passe son temps emportée par la fièvre ou la douleur. Mais c’est toi, Helana. C’est moi ? Oui, c’est elle. C’est elle que la douleur assaille quand ce n’est pas le délire. Ses sourcils se froncent un peu plus. Sa mâchoire se serre sous les assauts d’une migraine terrible, ce qui ne fait qu’accentuer sa douleur. Allongée sur le dos, elle a les entrailles en ébullition ; elles se tournent et se retournent, se tirent et s’étirent. Son estomac lui parait faire la taille d’un grain de sable et être aussi dense que du plomb. Chaque geste est une douleur. C’est une épreuve. Helana n’a jamais été aussi faible qu’en cet instant précis. Ses membres sont cloués au lit. La gravité la terrasse. Toute bataille finit inévitablement par faire sombrer Helana dans un sommeil tourmenté. Elle n’a plus aucune notion du temps. Une seconde lui parait durer une éternité et elle n’a pas la moindre idée du temps qu’elle passe à comater ou à dormir. Le silence est tantôt un cocon, tantôt une torture. Le temps. C’est une notion qu’elle ne saisit plus. Ses lèvres sont obstinément fermées alors que la nausée l’assaille : elle ne veut pas rendre encore ce qu’elle a réussi à ingérer. Parce qu’Helana fait toujours preuve de son infaillible détermination, elle ne compte pas se laisser aller et conserve tous ses sens tournés vers sa future guérison. Guérison dont elle ne perçoit pas encore les lumières. Mais elle viendra. Elle ne demeurera pas ainsi pour toujours. Elle a mené de nombreux combats et s’ils n’ont pas tous été victorieux, elle a toujours su rester débordante de vitalité – la force première de la terre. Sa force première à elle. Mais la terre, elle s’est échappée. Elle l’a sentie la quitter, si tant est qu’elle puisse le faire. Elle se vide de sa marque et de son emprise, elle abandonne son sang, s’extirpe par chacun de ses pores et retourne là d’où elle vient. La perte s’inscrit au plus profond d’elle et la tristesse la dévore. Helana est trop faible pour tenter de maitriser quoi que ce soit, mais elle entend le grondement constant qu’elle provoque faiblir, s’amenuiser à chaque nouveau battement de cœur alors qu’autre chose le remplace. Quelque chose de froid et différent. Quelque chose de dur et tranchant. Elle ne comprend pas. Elle ne saisit pas. Elle sombre dans ses délires fiévreux et se croit vivre les morts de Braenna, Metylda et Persivell. La douleur l’assaille sous les coups qu’elle croit recevoir et elle sombre un peu plus. Ses nausées la réveillent et elle rend ce que son corps n’a pas eu le temps d’absorber. Il n’y a presque plus que de la bile : son estomac refuse les offrandes de la terre et de ses enfants comme si son propre corps n’était plus capable de les assimiler. Elle est épuisée, incapable de pleinement se reposer. La maladie la terrasse. Elle aperçoit des fantômes devant ses paupières closes. Elle sent leur poids lourd peser sur son corps affaibli. Elle se croit suffoquer, incapable de bouger, clouée à un lit aussi froid et lisse que la surface d’un métal poli. Plus qu’aucun membre de la maison Wheatdrop, Helana est touchée par la maladie. Les habitants de la citadelle lui rendent tour à tour visite mais restent peu longtemps : de toute évidence, la maitresse de rien du tout a besoin de repos. Elle ne retient pas bien les visages, ni même les conversations. A la fin, ces jours (semaines ?) de torture ne seront qu’un souvenir vague et douloureux. Elle se souviendra de chaque sensation mais d’aucun moment particulier. On lui parlera de confidences qu’on lui a faites et elle ne pourra que renvoyer un air interrogateur et désolé. Mais peu importe : on comprendra. Elle n’oubliera cependant pas cette sensation terrible de vide dévorant, exponentiel, jusqu’à ce que son corps se nourrisse d’autre chose. De ce qu’il trouve. Ses pensées volent vers Circe. Est-ce qu’il l’entend ? Est-ce qu’il la perçoit ? Est-ce qu’il sent sa faiblesse et sa tristesse, le poids de son deuil – celui des membres de sa famille –, celui de sentir son élément l’abandonner ? Est-ce qu’il sent sa fragilité ? Helana se sent coupée de tout. Coupée de lui aussi. Quelque part, elle est terrifiée. Elle a l’impression que le monde s’écroule et que rien ne se passe. Elle sent son ventre s’ouvrir, sa tête exploser. Mais elle vit toujours, parce qu’on ne peut pas la terrasser. Elle reviendra bientôt aussi forte et déterminée qu’avant, si ce n’est plus, et elle grondera toujours. Mais autrement. Elle a les yeux clos et dort. La nuit est tombée et la plupart des bougies n’ont pas été rallumées. L’obscurité lui fait du bien. Ses rêves tourmentés l’agitent : sa cuisse nue sort de sous la couverture épaisse. La sensation de fraicheur lui fait du bien, mais elle grelottera sous peu. Elle a l’impression d’être écrasée par une présence folle. Elle perçoit une ombre imposante au milieu de son rêve mais ne frémit pas. Elle reste. Ses yeux clos sont plongés dans le noir absolu et s’y sont installés. Helana s’enfonce un peu plus dans le sommeil et ses tourments. Ses souvenirs se mélangent : elle vit la bataille de Biogehira en même temps que la nuit qui a suivi, où ils ont fait l’amour, Circe et elle, l’esprit embrumé par les récents événements et la proximité nouvellement retrouvée du télépathe. Elle avait cette nouvelle habileté de le sentir à son tour, depuis la libération de Hissa, et a maintenant la sensation que cela disparait aussi. Mais elle a autant de certitudes qu’elle a de doutes. Si bien qu’elle s’y perd elle-même, embrumée dans ses délires et trempée de sueur. Ses sourcils se froncent. Elle gémit. Sa cuisse est froide : son membre rejoint la chaleur de la couette. Helana se recroqueville sur elle-même, tandis que ses entrailles reprennent l’assaut, mais ne se réveille pas. Trop épuisée pour. Son corps parait toujours écrasé par un poids indéfini, venu de nulle part. Mais rien ne saurait la réveiller maintenant. |
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