Le repos n'était pas de mise. Seren avait l'impression de n'être qu'un simple spectateur de sa vie, parce qu'il ne comprenait pas. Tout défile, tout passe à une vitesse extrême devant lui et il a l'impression de ne rien pouvoir faire, d'être totalement perdu. Le sentiment d'impuissance qui lui parcourait le corps était bien trop difficile à supporter pour le gamin qui venait de souffler ses dix neuf ans il y a peu. Depuis son retour il avait l'impression de ne plus se sentir à sa place, il ne se sentait pas bien auprès de la nation de la terre. Eartanera n'était pas l'endroit idéal, les feuillages cachaient la lune, la lune qui était devenue une alliée fidèle depuis le virus. Et cette purge, cette purge qui avait frappé Aksana, la folie meurtrière causée au nom de la religion. Religion qu'il n'a jamais considéré. L'ancienne religion est pour lui la plus passionnante, la plus intéressante et la plus véritable. Celle qui possède un véritable lien avec les éléments et l'histoire des maîtres. Non pas la substitution arrivée bien après. Azurite lui manquait, le palais dans lequel il avait évolué pendant peu de temps lui manquait aussi. Sa soeur, son cousin. Il avait pensé bien faire en y allant, trouver des réponses à ses questions. Mais l'effet inverse venait de se produire, il avait envie de partir loin d'ici pur se retrouver seul. Loin des complots, des médisances, loin de la résistance meurtrière à laquelle il ne voulait plus être associé. L'esprit de Seren était cruellement torturé, à l'écart du camp il regardait dans la pénombre les arbres qui semblaient s'étendre à l'infini. Le corps stoïque qui ne faisait pas attention au reste, et ce regard vide qui était dans un autre monde. Dans celui de pensées complexes d'un jeune adulte. L'ancien maître de l'eau entendit alors du bruit. Brusquement ses pensées cessèrent de se poser des questions pour laisser place à l'instinct de survie. Le camp était-il attaqué ? Qui venait ici ? Il se retourna et c'est là qu'il découvrit son père devant lui. Lex Osanos, le grand et l'unique. L'ami de la lune n'avait pas encore eu l'occasion de discuter avec son géniteur. Lui qui voulait l'admiration de son père depuis tant d'années, il se rendit compte que celui-ci s'en fichait. Qu'allait-il lui dire ? Qu'allait-il lui annoncer ? Hettie allait encore l'emmener, il n'avait plus envie de la voir, d'être seul avec elle. Profondément blessé par l'image qu'il avait eu des deux s'embrassant à Zunear, il préférait oublier ce moment et le bannir de sa mémoire. Le jeune homme avait le visage plutôt fermé face à Lex, déterminé à affronter son père et cette fois-ci ne pas se laisser faire. « Père. En quoi puis-je être utile ? » Petite pique. Parce qu'on ne le considère jamais, on ne lui demande jamais rien. Et ça le blesse, ce sentiment d'inutilité grandit chaque jour un peu plus. Être protégé ce n'était pas ça qu'il souhaitait. Le cadet des Osanos avait envie de montrer ce dont il était capable, ce qu'il pouvait faire. Mais non, ils préféraient tous le considérer comme un jeune enfant que l'on doit bercer d'illusions. Ce temps était révolu, l'ancien Seren Osanos avait disparu depuis la soirée de la purge, depuis la vision d'horreur des mutants traqués, des personnes comme lui. Comment l'homme pouvait-il être aussi cruel ? Question sans réponse encore une fois.